mardi 5 février 2013

Back to the old house

Cher Eugene,

Bien que tu ne m'aies pas répondu la dernière fois, je suis quand même venu à ta rencontre lors de ton passage à Nantes la semaine dernière.

Je vais commencer par te faire une confidence : quand je vais à un concert, que ça soit sur la route, en attendant que ça commence, ou même pendant, si jamais le concert est mauvais, je prépare quelques accroches et 2-3 blagues pour l'article que je compte écrire (et que tu remarqueras toi aussi, je n'écris pas souvent puisque je n'ai toujours pas rattrapé mes quelques revues en retard).

Là en l'occurrence, je pensais déjà dire que tout était mieux avant : que si ton concert avait eu lieu à l'Olympic il y a 4 ans, tout aurait été tellement mieux.
Mais au fond j’espérais avoir tort (ça aussi je prévoyais de l'écrire vendredi soir oui), j'espérais que malgré ma mauvaise première expérience avec Stereolux et mon désamour profond pour ton album, j'allais pouvoir apprécier ton concert quand même.

Et à dire vrai, ce coup-ci la salle ne m'a pas déplu, à savoir si c'était dû à la présence limitée de viande alcoolisée dans la salle (et donc la limitation des risques de se faire vomir dessus) ou à la taille plus raisonnable de la salle Micro, je n’émettrais pas de conclusion, mais sur le coup Eugene, malgré tout tes efforts, j'ai trouvé ça bien que ta musique soit moins fédératrice que celles des groupes qui passent au festival des Inrocks.

J'ai aimé la salle peut-être parce que quand je suis arrivé c'était les Rhum for Pauline qui y jouaient. Tu sais, je les connais depuis à peu près aussi longtemps que toi (à environ un an près, mais tu sais, à nos âges, un an, ce n'est musicalement pas grand chose), à l'époque où je les avais découverts, ils étaient 2 et faisaient la première partie des Music Is Not Fun, relativement inconnus aussi à l'époque. Toujours est-il qu'eux aussi ont évolué vers un son plus dense, mais sans y perdre leurs forces, et le public ne s'y trompe pas et était presque plus enthousiaste que pendant ton concert (et je ne pense pas que c'était seulement parce qu'ils sont de la maison), mais je m'étendrais plus sur ces détails après.

Et puis tu es arrivé, tu nous as fait 2-3 signes désinvoltes en évitant de te décoiffer (tu n'as peut-être pas tort, vu que dernièrement la presse parle au moins autant de tes cheveux que de ta musique) et tu as commencé avec une chanson de ton dernier album, suffisamment dénuée de saveur pour que j'oublie de laquelle il s'agissait, tu as du continuer pendant plusieurs chansons comme ça, puisque la première qui m'a vraiment marquée c'est Fonz, sur laquelle l'ajout des claviers était suffisamment légère et juste pour ne pas gâcher l'écoute. Tu confirmais ainsi le sentiment que j'avais eu en entendant Harlequinade avant : quand tu arrives à en réfréner les vomissements synthétiques, même tes nouveaux titres deviennent appréciables.
La suite du concert a été une suite de goût/dégoût, puisque tu mêles dans ta set-liste de nouveaux titres comme All and all pas désagréables, des vieilleries bienvenues comme Those old black and white movies were true, mais tu arrives quand même à balancer des Video Game et Joshua aussi dégoulinants que sur album.
Dis-toi quand même que j'ai regretté de ne pas avoir assez écouté The Invitation to the Voyage : j'entreprenais de compter les chansons que tu en avais jouées, pour savoir combien, au maximum, il me restait à en supporter, et ma méconnaissance m'a frappé, si bien qu'après un Sugarplum qui ne s'avère même pas faire lever les foules, je me suis pris à espérer un Atlas, un Moscow State Circus ou n'importe quoi d'autre en rappel, mais pas ce plat et créativement vide Shotgun (ou cet hommage, c'est comme ça qu'il faut dire a priori), et là, n'en pouvant plus, j'ai fait un truc que je ne fais pourtant jamais : je suis parti, parce que j'en avais marre, parce que j'avais envie d'éviter la file d'attente pour récupérer l'euro de consigne de mon verre et aller pisser, et surtout parce que j'en étais rendu à me sentir exactement dans l'état morbide que Nick Hornby décrit dans Juliet, Naked :

"Mediocre loud music penned you in to yourself, made you pace up and down your own mind until you were pretty sure you could see how you might end up going out of it."

Et puis quand je suis sorti des chiottes, tu avais fini, et les gens ne réclamaient rien, ce qui m'amène à un point important : 
Je ne sais pas si c'est seulement le public nantais, parfois assez froid il est vrai, ce qui expliquerait que tu aies "oublié" de remercier Nantes sur ta page facebook (ouais, parce que j'imagine qu'on a du te dire qu'aujourd'hui pour avoir du succès il fallait bétonner les réseaux sociaux), mais l'apathie du public, et plus particulièrement vis-à-vis des titres de ton dernier disque est consternante quand on voit que ceux-ci sont pourtant conçus pour faire bouger les foules, au détriment de tout ce qui faisait la force de tes chansons. Et pourtant quand tu t'arrêtes pour entendre le public, un silence te répond, et même la ritournelle Sugarplum n'est pas reprise par plus de 15 personnes.
Enfin, même si elle est restée de marbre, la salle était quasi-pleine, c'est au moins ça de gagné, mais peut-être que ce relatif succès commercial est suffisant à tes yeux après tout.

Adieux définitifs sauf si tu changes d'avis quant à ta marche à suivre du coup.

Un ancien fan, toujours anonyme mais désormais sur de lui